Dépêche 80/00
Lettre à Laurent Fabius,
Paris le 27 mars 2000
Monsieur Laurent Fabius
Ministre de lEconomie, des Finances et de lIndustrie
Monsieur le Ministre,
Le ministère vient de connaître une mobilisation historique des personnels, tant par sa durée que par son ampleur. Au cours de ce conflit, les agents nont mis en avant ni des préoccupations corporatistes ni des revendications matérielles, ils ont défendu le service public. Ce faisant, et quoi quen aient dit certains, ils ont porté tout aussi haut leur volonté de modernisation que leur rejet dune réforme quon voulait leur imposer.
Ainsi, en retirant la réforme quil avait annoncée le 27 janvier, votre prédécesseur a pris une première mesure dapaisement. La CFDT ne souhaite pas que les négociations doivent reprendre avec vous fassent limpasse sur les quelques engagements positifs figurant dans le document remis aux fédérations le 18 mars.
La CFDT en a identifié quatre, deux sur lemploi et deux sur la modernisation.
La question de lemploi est la première priorité de la CFDT. Aussi le premier engagement que nous citerons porte sur larrêt des suppressions demplois pendant la durée des discussions sur la modernisation du ministère. Cest une question de confiance et de logique. On ne peut pas demander aux personnels de sengager dans un changement de grande ampleur et prévoir de façon concomitante des suppressions demplois sauf à dégrader le service public. Au demeurant, il nest pas possible de déterminer, comme le faisait le contrat passé entre la DGI et le budget, un retour sur investissement avant le début de mise en uvre de la future réforme. Gemini Consulting a estimé à cet égard, mais ce nest quun exemple, quil faudra 7 ans pour créer linformatique ministérielle moderne et unifiée dont nous avons besoin.
La CFDT nécarte donc pas comme illégitime toute interrogation sur la possibilité de réduire les coûts du service public au moyen de gains defficacité. Mais elle considère que ces gains ne sont ni certains ni systématiques et quils sont un élément mineur de lévaluation des emplois nécessaires. Le second engagement quil faut relever est létablissement dun lien entre lemploi, les missions, la RTT et la formation. Affirmer, comme cela a été trop souvent fait, que le MEFI nest pas prioritaire en termes demplois cest nier tout examen objectif et contradictoire de ses missions. Qui peut dire, a priori, que le contrôle fiscal, la gestion des collectivités locales, la sécurité alimentaire ont besoin de moins de fonctionnaires ? En matière de RTT, il sagit simplement dappliquer au ministère le principe affirmé par le gouvernement pour le secteur privé en la compensant par des recrutements. Quant à la formation, elle connaîtra un accroissement considérable dans le cadre de la modernisation dont il faudra également tenir compte.
Au changement de méthode sur lemploi doit sajouter la définition dune autre conduite de la modernisation au MEFI. Le recours à un projet technocratique élaboré dans par Bercy a échoué. Le rapport de la mission 2003, les fausses concertations et commentaires provocateurs qui lont précédé, ont entraîné un rejet massif des personnels. Le troisième engagement que rappelle la CFDT, y répond par le recours à une enquête indépendante comme première étape de lélaboration dune autre réforme des administrations fiscales. Pour mettre en uvre linterlocuteur fiscal unique, le dossier fiscal unique, améliorer les liaisons entre les administrations, examiner la place du recouvrement à la DGI et à la CP, il faudra rendre aux agents la parole confisquée par les filtres administratifs.
Mais les missions fiscales de la DGI et de la DGCP ne doivent pas occulter, les autres réformes en cours, trop imprécisément visées par le « nouveau concept ministériel » de concertation qui est le quatrième engagement à préserver. Le « plan Auvigne » en Douanes ou le projet « Région 2000 » à la DGCCRF, conçus sans dialogue doivent être suspendus et entièrement renégociés. Enfin, il ne suffit pas daffirmer lambition de développer les missions de la DGCP pour lui en donner les moyens. La CFDT demande louverture dune réflexion approfondie sur les missions du réseau de proximité du ministère et sur les points de contact quil peut offrir aux administrations du MEFI comme aux administrations dEtat sur tout le territoire.
Enfin, la question du paiement des jours de grève et celle des sanctions envisagées contre certaines actions de grève doivent faire lobjet de mesures rapides dapaisement.
Au total ce sont des sujets à la fois lourds et urgents qui vous sont soumis. Pour commencer à les traiter la CFDT, vous demande de la recevoir dans les tout prochains jours.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, lassurance de ma considération distinguée.
Le Secrétaire fédéral
Damien Leroux