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Dépêche 103/04 
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La fédé
 

Réforme de la taxe professionnelle : le pré rapport

Suite à l’annonce du président de la République lors de ses vœux 2004 de la suppression de la taxe professionnelle (TP), le premier ministre a confié à une commission présidée par M Fouquet le soin de trouver un impôt plus juste et plus efficace économiquement. Un rapport d’étape a été publié le 7 juillet 2004, le définitif étant prévu pour l’automne.

Une grande partie de ce rapport d’étape porte sur le constat suivi de pistes de travail qui devront faire l’objet de simulations approfondies.

Un impôt imbécile ?

Le montant brut des recettes de la TP 2003 s’élève à 29,4 milliards d’euros, mais après application des divers dégrèvements il n’est plus que de 22 milliards. Comme la TP est déductible de l’impôt sur les sociétés (IS), l’impact réel sur les entreprises s’établit à 16,7 milliards.

Pour les collectivités locales, la TP est une ressource essentielle (entre 13,5 % et 16,5 %).

L’Etat est le principal contributeur puisqu’il prend en charge les dégrèvements (7,6 milliards), soit 38,5 % des recettes de la TP. Cette part n’était que de 24,9 % en 1998 (avant suppression de la part salariale dans l’assiette).

La TP est un impôt complexe à gérer tant par les redevables que par les administrations financières (décalage de deux ans entre les bases d’imposition et le paiement, dépôt dans chaque commune d’une déclaration pour les entreprises à établissements multiples, complexité de détermination des valeurs locatives, etc.).

Le rapport analyse ensuite les mesures successives prises depuis la création de la TP en 1975 afin de répondre aux critiques récurrentes. Au total, cela aboutit à une forte concentration de l’imposition : 10 % des entreprises payent 90 % de la TP, 1 % en payent 70 % et 0,3 % (1 700 entreprises) près de 50 %.

La commission reconnaît que la TP a été un puissant facteur de développement de l’intercommunalité.

Un handicap pour la compétitivité

Si la commission ne conteste pas l’imposition locale des entreprises pour prendre en charge le coût induit de leur installation, elle pointe que les bases d’imposition d’une entreprise donnée correspondent imparfaitement aux coûts réels. La taxe crée des distorsions et accentue les écarts de richesse entre collectivités en raison notamment de sa concentration ci-dessus évoquée. Les distorsions de concurrence entre entreprises résultent des différences des taux votés. Exemple : le taux global moyen de la Basse-Normandie, 18,85 %, et celui de Languedoc-Roussillon, 32,48 %. Sur tout le territoire national, les taux varient de 10 % à 45 %. La tendance n’est pas au rapprochement des taux.

S’agissant de la base d’imposition, le rapport estime que la taxe pénalise l’investissement, et donc indirectement l’emploi que le système imparfait du plafonnement de la valeur ajoutée n’atténue pas. La TP désavantage les entreprises françaises face à leur concurrentes étrangères non soumises dans leur pays à ce type d’imposition, et pénalisent spécifiquement les secteurs historiquement plus exposés aux risques de délocalisation.

Les pistes de travail

La commission doit respecter quatre conditions :

§         préserver l’autonomie des collectivités locales

§         maintenir un lien avec l’activité économique des territoires

§          ne pas opérer de transfert de charges vers les ménages

§         faciliter le développement de l’intercommunalité.

Elle explore trois pistes, la suppression, l’aménagement ou le remplacement de la taxe par un autre impôt dans le respect des conditions ci-dessus.

La suppression de la TP conduirait l’Etat à doter budgétairement les collectivités locales du manque à gagner. Or, la constitution ne le permet plus depuis le 28 mars 2003 (loi constitutionnelle sur la décentralisation).

L’alternative serait de transférer une partie des impôts d’Etat au risque que les ménages en supportent la charge.

L’aménagement de la taxe consisterait soit à modifier les bases physiques actuelles (valeur nette comptable des équipements et non brute), soit à instaurer un plafonnement réel en fonction de la valeur ajoutée (pouvant entraîner une nationalisation de la TP).

Le remplacement par un nouvel impôt viserait à introduire une nouvelle assiette qui pourrait être le chiffre d’affaires, la valeur ajoutée, l’excédent brut d’exploitation (EBE), le résultat courant ou net. Une assiette mixte peut être étudiée.

Les modalités de la réforme

La commission s’interroge s’il faut reconstituer le produit actuel de la TP ou créer un nouvel impôt d’Etat. Elle souhaite, avec prudence, une remise en cause des exonérations catégorielles (sur 3,6 millions de redevables potentiels, 0,9 sont exonérés) abandonnant pratiquement la mise à plat les exonérations géographiques.

Le rapport plaide pour la spécialisation déjà en cours (12 000 communes en 2003), mise en place d’une TP unique pour les EPCI (établissement public de coopération intercommunale)

Enfin, s’agissant du vote des taux, la commission s’interrogera sur les modalités de fixation du ou des taux, sur la pertinence du niveau de leur détermination, local ou national, et sur l’opportunité du maintien des règles d’encadrement et de liaisons des taux.

Premières analyses

Moins de 6 ans après sa création, la TP a été qualifiée d’impôt imbécile par François Mitterrand nouvellement élu en 1981. Ce jugement sévère et peu contesté ne fut pas définitif puisqu’il est toujours d’actualité en 2004. L’annonce par Jacques Chirac mettra-t-elle fin à la lente agonie de cette taxe ?

Au-delà de ce feuilleton, la mise en place des lois de décentralisation, le développement de l’intercommunalité, le nouveau contexte européen et la globalisation des échanges rendent certainement nécessaire une réforme d’ampleur des finances locales. La TP dont on connaît les difficultés de gestion, voire ses absurdités, pourrait en être le premier terme.

De son côté, le MEDEF rappelle son souhait de suppression de la TP et de son remplacement par une réduction des dépenses publiques.

 Si la commission ne va pas dans ce sens, il est à craindre une tentation de réduire les charges des entreprises sans contrepartie en emploi.

La TP est l'une des principales ressources des collectivités locales et un outil important de l'intercommunalité. Son remplacement par une dotation complémentaire de l'Etat serait contraire à l'accroissement continuel des pouvoirs des collectivités locales dans le cadre de la décentralisation.

La CFDT Finances a depuis longtemps pointé les incohérences de la TP que rappelle la commission. Le nouveau dispositif devrait, au moins, assurer une taxation commune au niveau national et/ou régional.

La réforme de la TP, pour nécessaire qu’elle soit, devrait s’inscrire dans une approche plus globale de la fiscalité des entreprises.

La commission rendra son rapport définitif à l’automne. A suivre !

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                                                                                Paris, le 8 juillet 2004